Un changement de génération s’est produit sur la scène culturelle au cours de l’année écoulée. De Esch à Mersch en passant par Dudelange et Luxembourg, de nouvelles personnalités sont aux commandes pour imprimer leur marque sur le paysage culturel du pays. Dans quelle direction et suivant quelles valeurs? Notre série de portraits débute avec Carole Lorang, directrice du Théâtre d’Esch.
C’est du jamais vu. Il y a record d’affluence en ce 19 juin 2019 pour la présentation de la prochaine saison théâtrale du Théâtre d’Esch. Le tout Luxembourg culturel semble s’être passé le mot. Responsables d’institutions, acteurs, techniciens, journalistes se pressent au bar du premier étage. Carole Lorang a succédé à Charles Muller en mars 2018 mais la dernière saison était encore fortement placée sous le sceau de son prédécesseur. Désormais, elle est seule aux commandes.
L’art du politique
Son arrivée coïncide avec un nouveau climat sur la scène culturelle eschoise. Le vote en juin 2017 d’un plan de développement culturel à dix ans pour la ville, l’arrivée d’une nouvelle équipe aux commandes de la municipalité en octobre 2017 mais aussi la perspective de la Capitale européenne de la Culture en 2022 ont ouvert une fenêtre d’action. Carole Lorang s’y est engouffrée sans hésitation et sans état d’âme.
C’est l’une des clés de sa personnalité. Si la nouvelle directrice du Théâtre d’Esch a des convictions, elle n’a pas de problème à travailler avec les politiques. Son prédécesseur, Charles Muller, avait souffert de «l’incompréhension» et de «l’incompétence» de certains membres de la Commission de la Culture de la ville. Le duo Andreas Wagner/Janina Strötgen, à la tête du projet de Capitale européenne de la Culture Esch 2022 jusqu’en juin 2018, défendait sa sacro-sainte indépendance et s’était maintenu à distance jusqu’au point de rupture. Carole Lorang, pour sa part, accepte sans broncher que l’échevin à la Culture, Pim Knaff, reste à ses côtés durant toute la présentation de son programme (une spécificité eschoise).
«La politique est une notion positive pour moi. Je ne parle pas de la politique politicienne mais du fait de travailler au service de la société. Le Théâtre d’Esch est un service communal donc il est normal que son programme s’inscrive dans Connexion, le plan de développement culturel de la ville», nous dit-elle lors d’un entretien sur la terrasse de son bureau encombré par les brochures de la nouvelle saison. Elle entend les besoins qui s’expriment, par exemple au sein des services sociaux ou scolaires, «mais c’est moi qui fait la programmation», précise-t-elle lorsqu’on lui demande quel est son degré d’autonomie dans ses choix artistiques.
«Il faut savoir négocier, expliquer ce que l’on veut. Je crois très fort en cela.»Carole Lorang
Déjà abonné? C’est par ici!