Rester inventif et réactif: une question de survie pour les restaurants, salles de fitness ou autres commerces qui maillent le quartier de Gasperich à Luxembourg. Dans cette guerre des nerfs contre la pandémie, l’usure gagne du terrain et l’avenir des entreprises est en jeu.

Antonio Bellanima ne décolère pas. Le patron du restaurant Quadro Delizioso, rue de Gasperich, n’a aucune envie de rouvrir sa terrasse le 7 avril, comme le propose le gouvernement. Il le fera. Mais à contre cœur. Pour ne pas laisser ses concurrents lui rafler sa clientèle: «Ça me ferait mal!»

Le Quadro Delizioso a perdu 40% de son chiffre d’affaires depuis le début de la pandémie. 10 de ses 22 employés sont au chômage partiel. Les aides de l’État et un emprunt lui permettent de se maintenir à flot. Pour faire fonctionner la terrasse, il devra rappeler cinq personnes. Une hausse de 50% de ses frais de personnel, pour une augmentation aléatoire de ses revenus. «On n’est pas à Perpignan ici! Il peut faire beau un jour et pleuvoir le lendemain, chaud à un moment de la journée et froid après. Un coup à rendre les clients malades. Et comment je vais m’en sortir? J’aimerais bien tirer Xavier Bettel par les oreilles jusqu’ici pour qu’il me dise comment gérer ça. Il n’y connaît rien!»

Son collègue du New Dehli, dans le Muehlenweg, n’a pas de terrasse. Donc moins d’états d’âme. Ramesh Chander Sati affiche un chiffre d’affaires en recul de 25 à 30% sur un an. «La clientèle est fidèle et le take-away fonctionne. C’est au niveau des boissons qu’on a perdu», dit-il. Un seul de ses huit employés est au chômage partiel: «Il y a beaucoup de travail dans les cuisines, le nettoyage, l’organisation». Tout est opérationnel pour accueillir des clients lorsqu’ils seront de nouveau autorisés à consommer en salle.

«Tout le monde est à cran»

Depuis le début de la pandémie, la clientèle s’est reportée sur les commerces de proximité. «On a plus de monde qu’avant, sans période creuse pendant la journée», me dit l’un des employés à la caisse du Smatch, le petit supermarché qui jouxte le Quadro Delizioso. Mais les contraintes sanitaires ont toujours du mal à passer. «Il faut sans arrêt être vigilant avec les gens qui ont oublié leur masque ou ceux qui ne respectent pas les distances de sécurité avant de passer en caisse». Dans ce quartier multilingue où l’on ne maîtrise pas toujours les nuances du vocabulaire de ses voisins, les conflits entre les hygiénistes et les dilettantes imposent au personnel de savoir jouer les casques bleus …