Les changements à la direction et au Conseil d’administration, après les départs de Suzanne Cotter et de la princesse Stéphanie, traduisent une reprise en main du musée par l’État. Notre analyse sur les défis structurels et conjoncturels du Mudam.

Un avion de combat soviétique, de type MIG-21, accueille les visiteurs dans le grand hall du Mudam où se déroule l’exposition «Post-capital: art et économie à l’heure du digital». Désarmé, les ailes repliées, le fuselage patiné par le temps et par les interventions de l’artiste britannique Roger Hiorns, il est cloué au sol. Certains y verront la figure allégorique d’un musée mis hors d’état de nuire, en attendant de sortir des zones de turbulences. Toujours est-il que les changements qui s’annoncent au parc Draï Eechelen pourraient sonner l’heure d’un nouveau départ, piloté par une nouvelle structure de commandement.

Avec Patrick Majerus, un militaire de carrière mais surtout collectionneur et grand donateur du musée est nommé à la présidence du Mudam à partir du 1er janvier 2022. Il succède à la princesse Stéphanie, refermant la parenthèse malencontreuse de sa nomination en 2015 par le Premier ministre et alors ministre de la Culture, Xavier Bettel (DP).

L’épouse du Grand-Duc héritier ne pouvant pas mettre en jeu sa responsabilité pénale, il avait fallu mettre en place, à côté du conseil d’administration, un comité de gestion et de finances. Celui-ci a servi de pare-feu mais a aussi dilué l’autorité de la présidence. Par ailleurs, le Mudam a été privé d’une voix capable de s’exprimer en cas de crise, comme on l’a vu au moment de «l’affaire Lunghi» ayant conduit au départ du directeur général fin 2016.

Le retour de l’État

L’expertise de Patrick Majerus, sa connaissance du musée aussi bien que sa personnalité en font un homme de consensus, même s’il n’aura pas l’autorité du premier président du Mudam, Jacques Santer, ancien premier ministre, ministre de la Culture et cheville ouvrière à l’origine de ce musée.

Patrick Majerus est nommé en tant que représentant de la société civile, mais on peut aussi voir dans ce choix de l’actuelle ministre de la Culture, Sam Tanson (Déi Gréng), un signal d’ouverture aux collectionneurs privés. Si elle n’a pas la fibre libérale de Xavier Bettel, elle sait que leur apport est essentiel pour développer une collection publique aux moyens financiers limités, dans un contexte de forte spéculation sur le marché de l’art contemporain. On note, au demeurant, que l’hypothèse de transformer en établissement public la Fondation Musée d’art moderne Grand-Duc Jean n’est plus à l’ordre du jour du Plan de développement culturel (KEP).

La nomination de Patrick Majerus s’opère parallèlement à la reprise en main du contrôle du Mudam par l’État, par d’autres chemins. Après le remaniement orchestré par Xavier Bettel en avril 2016, le conseil d’administration du musée ne comprenait plus aucun représentant de l’administration …