La ministre de l’Intérieur vient d’adresser une circulaire aux communes qui fait suite à un jugement retentissant sur l’exercice du droit de préemption sur les terrains à bâtir. Taina Bofferding promet une simplification des procédures et une réforme du mécanisme.
La ministre de l’Intérieur a laissé passer la canicule avant d’adresser aux administrations communales une circulaire sur le droit de préemption, instrument clef à la disposition des communes pour promouvoir l’habitat. Le droit de préemption donne aux communes et aux organismes publics (comme le Fonds du Logement) la priorité sur les promoteurs pour acquérir des biens ou des terrains mis sur le marché afin d’y développer du logement et des infrastructures publiques.
La circulaire fait suite à un jugement du 22 juillet dernier du tribunal administratif qui a été un coup de tonnerre dans la politique de logements à coût abordable. Saisi par un promoteur immobilier, qui s’était racheté un terrain à lui-même, la juridiction administrative a annulé une décision du collège échevinal de Sanem d’exercer son droit de préemption sur une parcelle située dans une zone à urbaniser.
Sanem avait fait une contre-offre de rachat sans avoir de plan précis ni projet concret sur la destination du terrain qu’elle acquérait ainsi pour 30.000 euros. La motivation des édiles aurait été avant tout financière. Les juges ont annulé la décision pour non-conformité, considérant que l’offre de la commune violait les dispositions du pacte logement.
Pour que le droit de préemption soit valablement exercé, il revient au conseil communal de motiver sa décision de préempter, qui devra contenir l’ensemble des éléments de fait permettant de vérifier la réalité de la finalité recherchée.“Taina Bofferding, ministre de l’Intérieur
En effet, les édiles de Sanem s’étaient contentés de faire un copier-coller de la loi sur le Pacte logement, sans pouvoir justifier ni expliquer la finalité du terrain à bâtir ainsi préempté. «Les explications, avaient estimé les magistrats, ne peuvent pas se limiter à des considérations abstraites et hypothétiques».
Difficile mais pas impossible
Les juges rendaient ainsi encore plus difficile («mais pas impossible», selon la ministre) le droit de préemption.
Le jugement du 22 juillet dernier faisait suite à une autre décision des juges administratifs, intervenue en janvier dernier à l’encontre du Fonds du Logement qui avait exercé son droit de préemption en violation de la règlementation sur le Pacte logement.
La ministre socialiste de l’Intérieur était intervenue au lendemain du jugement de janvier 2020 via une circulaire. Taina Bofferding enjoignait notamment les communes à faire preuve de souplesse et de flexibilité avec leurs conseils communaux sans l’approbation desquels l’exercice du droit de préemption n’est pas valable.
Les conseils communaux doivent donc être étroitement associés à la mise en œuvre de la politique de logement et d’urbanisme au niveau local.
La jurisprudence dessinée quelques mois plus tard a tracé de nouvelles lignes rouges à ne pas dépasser par les communes lorsqu’elles font valoir leur droit de préemption. C’est ce point que la ministre rappelle dans sa circulaire du 2 septembre.
Une réforme pas avant 2021
«Pour que le droit de préemption soit valablement exercé, il revient par conséquent au conseil communal de motiver sa décision de préempter, qui devra contenir l’ensemble des éléments de fait permettant de vérifier la réalité de la finalité recherchée», précise Taina Bofferding.
Un groupe de travail interministériel (Intérieur, Logement, Energie et Aménagement du territoire) réunissant également des représentants des communes (Syvicol) ainsi que des experts du secteur communal a été chargé d’élaborer «des pistes de solution» pour simplifier la procédure applicable au droit de préemption.
Toutefois, les propositions et la réforme promise ne seront pas finalisées avant 2021.