Le Luxembourg peine à se doter d’une politique de développement ou de co-développement régional transfrontalier. Dans ce deuxième article sur le sujet, nous essayons d’éclairer à quel point la visite d’Etat en France de mars 2018 et les dossiers de co-développement régional ne pourront pas être annulées par des mesures qui auront l’effet d’une goute dans l’océan.
Alors que ses relations avec les responsables lorrains étaient marquées depuis un certain temps déjà par la frustration et un manque de confiance réciproque, le Luxembourg s’est vu confronté en amont de la visite d’Etat en France des 19 au 21 mars 2018 à une longue série de revendications en matière de co-développement régional transfrontalier. La plus révélatrice a été celle de la rétrocession fiscale, soulevée en Lorraine et reprise par le ministre des Affaires étrangères français, Jean-Yves Le Drian, quand il a souhaité le 13 mars devant le Sénat qu’il y ait « un retour sur l’impôt sur le revenu que le Luxembourg prélève sur nos frontaliers ».
Des élus de tout bord du Sillon lorrain avaient demandé auparavant la création d’un fonds métropolitain transfrontalier cogéré avec le Luxembourg qui aurait été alimenté par un prélèvement de 3,5 % du salaire brut des frontaliers lorrains, 157 millions d’euros, selon l’estimation des signataires. Cette somme, constamment adaptée au nombre des frontaliers, n’aurait pas seulement servi à financer des projets de mobilité, comme cela a été décidé entre la France et le Luxembourg à concurrence de 12 millions par an sur dix ans de part et d’autre, mais aussi dans l’aménagement du territoire par les départements et les communes.
Le fonds luxo-lorrain
Un modèle de ce genre existe depuis 1973 entre le canton de Genève et les départements français de l’Ain et de la Haute-Savoie, grands réservoirs de travailleurs frontaliers. Les départements investissement dans de grands équipements collectifs et reversent une partie de ces fonds, 241 millions d’euros en 2017, la somme dépendant du taux de change avec le franc suisse et de la masse salariale concernée, à leurs communes où habitent aussi de nombreux Suisses pour le financement de projets tels que des écoles, des logements, des équipements etc… L’intérêt commun est mis en avant, même si sa mise en œuvre n’est pas un long fleuve tranquille.
Il existe aussi un accord entre le Luxembourg et la Belgique, qui succède à un accord plus ancien au sein de l’UEBL de reversement compensatoire d’accises, dans le cadre duquel le Luxembourg verse 30 millions d’euros qu’il a prélevés sur les salaires des frontaliers belges à un fonds dit « Reynders », qui transfère quant à lui ces fonds vers les communes limitrophes avant tout. Ici l’histoire joue un rôle. Mais la différence qu’évoque souvent la partie luxembourgeoise est qu’en France, les habitants paient à leur commune une taxe d’habitation et en sus une taxe foncière s’ils sont propriétaires, alors qu’en Belgique, les habitants ne paient pas d’impôts locaux, les communes se finançant sur une partie de l’impôt sur le revenu. Bref, la France dispose pour le Luxembourg d’un mécanisme de financement des communes qui neutralise le facteur « frontaliers ».
Le Niet au fonds luxo-lorrain
La réponse luxembourgeoise à la revendication des élus lorrains a été unanimement négative. Mais c’est surtout la forme du refus qui en dit long sur un rapport entre Lorrains et Luxembourgeois saturé de dits et surtout de non-dits.
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