Le procès pour escroquerie visant un notable, ancien membre de la Grande Loge de Luxembourg, et ses fils s’est achevé sur fond de rancoeurs entre francs-maçons. Les prévenus sont accusés de «hold-up» sur les actions d’une société et ses 12 millions d’actifs immobiliers dans la capitale.

Le litige opposant la famille Schleich à la franc-maçonnerie pour le contrôle d’un patrimoine immobilier revendiqué par la confrérie, met sur le devant de la scène un des instruments les plus controversés de la place financière: les actions au porteur. Supprimés en 2015, ces titres ont pendant longtemps garanti l’anonymat à des milliers d’entrepreneurs pas toujours fréquentables. Ils ont aussi abondamment alimenté les chroniques judiciaires des années 1990 et 2000, en raison de l’usage malveillant qui en a été fait.

«Il y a une malédiction des actions au porteur, qui disparaissent, sont perdues ou rééditées», a assuré Me André Lutgen lors du procès pour abus de confiance, vol et escroquerie de Jean Schleich et de ses enfants qui s’est ouvert le 8 juin devant la 12e chambre du tribunal correctionnel. L’avocat représente les intérêts de la Grande Loge de Luxembourg et du Suprême conseil du rite écossais ancien et accepté pour le Grand-Duché de Luxembourg (Sucol), à l’origine d’une plainte contre les Schleich, père et fils.

Reglement de comptes historiques

Parties civiles, les deux organisations maçonniques se disent victimes du «hold-up» en 2011 de Jean Schleich, ancien franc-maçon, sur le capital de la Sasec, société détenant des actifs immobiliers dans les beaux quartiers de la capitale. Un patrimoine évalué à près de 12 millions d’euros et supposé appartenir à la Grande Loge et au Sucol, avec quelques actionnaires individuels résiduels, très minoritaires.

Les deux Loges luxembourgeoises avaient saisi la justice en novembre 2012, après que leurs membres eurent été écartés du conseil d’administration de Sasec et d’une fondation au Liechtenstein par Jean Schleich. Ce dernier, lui-même franc-maçon, plaça ses deux enfants et émit des prétentions sur la propriété des actions à la grande surprise de ses «frères» maçonniques. Jean Schleich prit par la suite ses distances avec les Loges. Son avocate parle de complot maçonnique à son égard. La procédure judiciaire a duré 9 ans avant le renvoi des trois prévenus devant les juges correctionnels.

Le procès a étalé sur deux semaines au public les rivalités historiques et les intrigues entre francs-maçons, qui d’ordinaire traitent leurs affaires dans le plus grand secret. L’enjeu principal porte sur la propriété de deux paquets d’actions au porteur: un premier de 240 titres et un second de 750 actions ayant été déposées en 1990 dans un trust au Liechtenstein, la Junck Stiftung …