Le rapport d’un détective privé et ex-informateur du Srel sur les liens supposés de Luxaviation et de son dirigeant avec le KGB a été au cœur d’un procès en diffamation devant la Cour d’appel. L’affaire met en cause les méthodes d’une compagnie belge pour ternir la réputation de son rival. 

Son procès en diffamation en première instance à l’automne dernier et en appel en juin n’ont fait aucune vague. Pour autant, selon les déclarations du Parquet à l’audience, cette affaire hors norme ne serait que «la pointe de l’iceberg». Bernard Van Milders, fondateur et actionnaire majoritaire de Flying Group, compagnie de jets privés à Anvers, a été renvoyé devant les juges correctionnels à l’issue d’une plainte de Patrick Hansen, le dirigeant de Luxaviation, société concurrente à la sienne. L’affaire prend son origine dans le rapport que Flying Group commande en 2013 à la société d’investigation Bres Investigations.

Ce n’est pas tant le rapport qui est au cœur de la procédure judiciaire que son exploitation supposée par la Direction de l’aviation civile pour enquêter sur la gouvernance de Luxaviation. Le gérant de Bres Investigations est André Durand. Son nom est cité alors dans l’affaire des dysfonctionnements du Service de renseignement luxembourgeois.

L’ombre de l’oligarque russe

L’affaire Flying Group prend son point de départ dans la concurrence acharnée que se livrent dans les années 2010 les sociétés de jets privés. A l’époque, les dirigeants belges se posent des questions sur l’expansion fulgurante de leur concurrent Luxaviation sur le marché européen de l’aviation d’affaires. Ils s’interrogent sur l’origine des fonds qui permettent aux Luxembourgeois de s’offrir au prix fort des sociétés concurrentes. En juin 2013, Luxaviation met ainsi la main sur Abelag Aviation, société belge sur laquelle Flying Group avait aussi des vues.

Il fallait trouver quelque chose contre lui qui puisse mettre en cause son honorabilité, faire perdre la licence et clouer les avions au sol.“
Lydie Lorang, avocate de Patrick Hansen

Jusqu’en 2008, le milliardaire russe Nicolay Bogachev, ex-officier du KGB, le service secret de l’Union soviétique, avait le contrôle de Luxaviation. Il a remis la société à flot, mais il finit par être éjecté du capital par Patrick Hansen et ses associés du fonds de private equity Saphir Capital Partners. Or, le rapport du détective privé prête encore à l’oligarque une participation majoritaire dans la compagnie.

Ce n’est pas la seule ineptie du document controversé de deux pages et demie qui a valu à Bernard van Milders son renvoi devant les juges correctionnels. Le rapport fait un amalgame entre les fake news, les ragots et les approximations en s’appuyant sur des discussions que son auteur André Durand a glanées auprès de divers interlocuteurs, parmi lesquels un collaborateur du milieu politique et un haut responsable de Cargolux …