L’Autorité européenne de surveillance des marchés financiers (ESMA) a classé sans suite une plainte contre la Commission de surveillance du secteur financier (CSSF) pour sa gestion du fonds d’investissement spécialisé (FIS) «LPF1», au cœur d’une fraude présumée s’élevant à près de 100 millions d’euros.

En février 2020, le «Financial Times» faisait état d’une plainte introduite par David Mapley, alors chargé d’enquêter sur la fraude dans plusieurs compartiments du FIS auprès du régulateur européen. L’homme reprochait alors à la CSSF de privilégier les intérêts de la place au mépris de la protection des investisseurs. Il reprochait au régulateur luxembourgeois ses négligences dans la surveillance prudentielle du fonds et l’accusait aussi d’avoir entravé ses efforts pour récupérer des avoirs ainsi que ses investigations sur l’origine de la fraude présumée.

En novembre 2020, l’agence de presse «Reuters» citait un courriel de l’ESMA selon lequel l’autorité européenne menait une enquête préliminaire pour déterminer si la CSSF avait enfreint les règles de l’UE dans sa supervision. Reporter.lu a appris que l’enquête préliminaire n’avait pas permis d’étayer les accusations. Contactée par la rédaction, le service presse de l’ESMA a confirmé le classement sans suite de l’affaire, après une «évaluation approfondie».

«L’ESMA confirme qu’en ce qui concerne les allégations qui relèvent de sa compétence, aucune enquête pour violation du droit de l’Union ne sera lancée dans cette affaire. L’ESMA a procédé à une collecte d’informations et à une évaluation approfondie avant de parvenir à cette position. L’ESMA a notamment reçu des informations confidentielles détaillées de la part de la CSSF, y compris sur ses actions de surveillance et d’application», explique un porte-parole de l’autorité européenne dans un mail. Egalement sollicitée, la CSSF n’a pas souhaité communiquer à ce sujet.

«Plusieurs actionnaires de LFP1 ont également déposé une plainte auprès de l’ESMA, qui leur a répondu qu’étant donné que la plainte faisait double emploi avec celle déposée par les anciens administrateurs, elle ne devait pas être traitée», a fait valoir pour sa part David Mapley dans un courriel à Reporter.lu

David Mapley avait pris la direction de LPF1 en 2018 à la demande d’investisseurs, après que ces derniers eurent pris connaissance de pertes importantes du fonds. Toutefois, les méthodes d’enquête controversées du Britannique lui ont valu l’animosité de certains investisseurs et l’intervention de la CSSF qui lui a retiré son honorabilité professionnelle en mai 2020. David Mapley se voyait reprocher de s’être prévalu de titres universitaires qu’il ne possédait pas et de ne pas avoir communiqué sur son implication dans une faillite.

L’enquêteur britannique a multiplié, jusqu’alors sans succès, les recours devant les juridictions civiles et administratives pour contester son éviction ainsi que le retrait du fonds de la liste officielle de la CSSF. Le fonds LFP1 a été retiré en juillet 2019 de la liste officielle des fonds régulés.

Les recours bloquent encore le placement en liquidation judiciaire du FIS, et partant le remboursement aux investisseurs des actifs en portefeuille ainsi que leur recouvrement. (VP)