La 16e chambre du tribunal correctionnel de Luxembourg a condamné le 31 mars, l’avocat français Olivier Riffaud à 24 mois de prison, avec sursis, pour abus de confiance et blanchiment. Célébrité dans les milieux huppés parisiens, notamment pour ses talents de fiscaliste et ses capacités à venir au secours des fraudeurs des impôts (la presse le baptise le sorcier de l’optimisation fiscale), Riffaud s’était inscrit au Barreau de Luxembourg après avoir été suspendu du Barreau de Paris. En France, il avait été condamné pour blanchiment et fraude fiscale. Olivier Riffaud connaît bien sa matière: il a été inspecteur des impôts en France, avant de se convertir dans le privé comme notaire d’abord puis comme avocat.

Arrivé au Grand-Duché, il se spécialise dans la clientèle d’exilés fiscaux. L’un de ses clients lui confie 1,281 million d’euros pour solder une dette fiscale, après que l’administration française l’eut épinglé pour des comptes non-déclarés chez HSBC à Genève.

Mais Riffaud ne relaie pas tout l’argent de son client à l’administration française comme il le fait croire à son mandant. Il détourne 463.248 euros pour financer son train de vie, payer ses propres dettes et loyers en retard de son appartement parisien dans le 16e arrondissement. L’avocat ripou décaisse même 21.130 euros de l’argent de son client pour payer ses impôts luxembourgeois à l’Administration des contributions directes. Il y puise aussi près de 7.000 euros pour s’acquitter de sa TVA. Il s’achète des lunettes à 6.000 euros et entreprend un voyage pour 15.000 euros.

Son client s’aperçoit du forfait de l’avocat lorsque le fisc français le rattrape pour le solde impayé de sa dette. Une plainte avec constitution de partie civile est déposée au Luxembourg en juin 2019. Olivier Riffaud est en aveu et justifie ses actes en raison d’une situation financière difficile.

Son procès en correctionnel est plusieurs fois repoussé, jusqu’à l’audience début mars. Me Benoît Entringer, son avocat, demande l’indulgence des juges pour donner à Riffaud une chance de rebondir et de rembourser sa dette, ce qu’il avait commencé à faire en partie (il lui reste néanmoins 304.245 euros à payer).

Autre partie civile dans cette affaire, le Conseil de l’Ordre des avocats fait plaider à l’atteinte à l’honorabilité de toute la profession. Le Barreau se pose en victime de la directive «home title», qui permet à un avocat européen de s’inscrire sur la liste luxembourgeoise, sans que l’Ordre ait les moyens de refuser cette inscription. Le cas d’Olivier Riffaud serait loin d’être unique et le Barreau cherche à faire un cas d’école. Le tribunal lui donne gain de cause et condamne Riffaud à payer à l’Ordre un euro symbolique.  (VP)


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