Le jugement dans l’affaire Excell Life, compagnie d’assurance-vie en liquidation judiciaire depuis 8 ans après avoir vendu des produits toxiques à des centaines d’épargnants, est tombé cette semaine. Les trois dirigeants ont été acquittés en vertu du dépassement du délai raisonnable.
Le volet luxembourgeois du scandale Excell Life fait pschitt. Jeudi 22 octobre, la 12e chambre du tribunal correctionnel de Luxembourg a rendu son verdict: les trois anciens dirigeants de la compagnie d’assurance-vie ont été acquittés de toutes les charges qui pesaient sur eux. Non pas, faute de preuve ni pour des raisons de prescription de l’action publique, mais parce que les juges ont estimé que l’enquête avait largement dépassé les délais raisonnables que les Etats démocratiques doivent respecter.
Les magistrats ont dit «fondé le moyen d’irrecevabilité des poursuites tiré de la violation de l’article 6-1 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme», dans le dispositif que Reporter.lu s’est procuré. Du même coup, les poursuites pénales pour abus de confiance, escroquerie, faux et blanchiment, retenues contre les trois prévenus ont été déclarées irrecevables.
Les pertes pour les investisseurs
C’est un peu une maladie luxembourgeoise de faire trainer en longueur et de négliger des affaires de délinquance financière qui n’ont pas d’impact direct sur l’épargne des résidents. Excell Life, qui avait son siège au Kirchberg, a fait des centaines de victimes en Belgique, en France et en Espagne, mais n’avait pas d’activité d’assurance sur le territoire grand-ducal. L’entreprise a vendu des produits d’assurance toxiques.
Le procès Excell Life s’est ouvert le 23 septembre dernier et s’est étalé sur deux audiences. L’affaire portait sur un volet assez marginal de cette fraude à l’assurance.
Trois hommes, dont Paul Michonneau, l’ancien dirigeant agréée de la compagnie devaient répondre sur le transfert en 2008 de titres émis par Lehman Brothers, peu après la faillite de la banque américaine, du compte interne d’Excell Life vers le portefeuille des clients. Ce faisant, les dirigeants faisaient endosser les pertes par les investisseurs.
Cette manœuvre a permis à la compagnie de conserver un niveau de solvabilité requis par la règlementation sur les assurances.
Une lettre anonyme
L’opération était passée inaperçue jusqu’en janvier 2010. A cette date, le Commissariat aux Assurances, régulateur du secteur, est alerté par une lettre anonyme. Une dénonciation au Parquet est introduite, mais l’enquête policière ne démarre vraiment qu’en 2016, sous l’aiguillon d’un juge d’instruction en Belgique où une enquête a été ouverte et où la plupart des victimes de l’escroquerie ont été recensées.
Pendant cinq ans, comme le substitut du Procureur d’Etat a dû lui-même le reconnaître, de 2011 à 2016, les enquêteurs sont restés inactifs.
Le ministère public avait requis une peine de prison avec sursis de 24 mois contre les deux principaux prévenus, Paul Michonneau et l’ex-directeur financier d’Excell, ainsi que 12 mois de prison contre un troisième homme, qui avait expliqué n’avoir pas eu d’autre choix que de signer l’ordre de transfert litigieux. Il craignait qu’un refus lui vaille un licenciement.
Le Parquet n’a pas encore pris de décision sur un appel éventuel du jugement.
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